sonar 2005: matthew herbert – plat du jour
A la vue de la grande affluence, à la version diurne du festival sonar, de la taille réduite du sonar hall, et de la grande notoriété de matthew herbert, il était évident que la salle ne pourrait pas contenir tous les amateurs. Je pris donc le chemin du sonar hall plus d’une heure à l’avance avec raison, tant la foule venue l’attendre était déjà fournie, laissant cependant assez de place a notre petit groupe pour pouvoir nous asseoir à quelques mètres de la scène.
30 minutes plus tard, le monde affluant sans cesse, nous devions nous résoudre à attendre debout, tandis que les nouveaux arrivants se trouvaient refoulés aux entrées, la salle ayant atteint sa capacité maximale. L’excitation montait peu à peu en observant les divers protagonistes du spectacle se préparer. Si il est commun de voir des techniciens brancher divers ordinateurs, synthétiseurs et autres écrans de contrôle, il est quand même moins commun de voir un percussionniste s’armer de palettes d’œufs, de cartons de céréales, de bouteilles d’eau et autres emballages alimentaires pour un concert. Encore plus déroutant, sur la gauche de la scène se trouvait une véritable cuisine tout à fait opérationnelle.
En effet, « plat du jour » se veut être un concept mélangeant musique et alimentation, la performance live devant lier naturellement sons, visuels et odeurs à défaut de pouvoir nourrir toute la salle.
Les mixers tournaient, les plaques chauffaient, semblable au bruit des violons s’accordant avant un concert classique, accompagnés de quelques sons ainsi que de fumigènes. Cette mise en place nous mettait véritablement l’eau à la bouche dans tous les sens du terme.
Avec un léger retard, le maître de cérémonie pouvait faire son entrée, vêtu d’un costume sombre des plus classique, d’un tablier de poissonnier et, touche finale, de bottes en caoutchouc blanches. Matthew herbert arriva l’air détendu, démontrant un flegme tout à fait britannique en parcourant la scène sous un tonnerre d’applaudissements. Il prit soin de présenter les acteurs présents avant d’expliquer brièvement le concept du spectacle, qu’il décrit comme une suite de tableaux présentant chacun un thème particulier. Si le premier tableau devait nous parler de poulets (en l’occurrence du destin d’un poulet d’élevage), l’interprétation des suivants serait en revanche laissée à notre imagination…!
Que la musique commence…
Armé d’un œuf et d’un bol, herbert se dirigeait derrière ses machines, enregistrait en direct le choc de l’œuf se brisant avant de moduler ce son, de le faire tourner en boucle pour créer la rythmique du premier morceau, accompagné des percussions culinaires improbables du choc des baguettes sur une caisse d’œufs durs, sous le fumet d’un repas étrange se préparant sous nos yeux.
Ainsi, entre les visuels, les odeurs et les sons, nous assistions à un spectacle des plus complets, dans une atmosphère des plus étranges et chaotiques. L’ensemble trouvait une harmonie complexe et efficace. Je restais bouche bée et savourais…
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Le concert ne cessa d’évoluer durant la prestation, enchaînant les rythmes, les sons, les odeurs. Les différents artistes donnant une véritable impression de complicité sur scène, c’était en soi tout un spectacle de les observer évoluer devant nous, venant tour à tour se retrouver sur le devant de la scène pour y déguster un des plats préparés sous nos yeux. C’était tout simplement incroyable de pouvoir observer matthew herbert le temps d’un morceau, démarrant chaque tableau par un sample d’origine culinaire naviguant entre les protagonistes avant de s’asseoir sur le devant de la scène, visiblement satisfait et détendu tandis que la musique battait son plein, saisir délicatement un verre de vin rouge, saluer son groupe ainsi que le public, avant de le déguster tranquillement…
A tout point de vue, cette prestation était hors du commun, parfaitement calculée malgré la sensation permanente d’improvisation, nous en prenions plein les oreilles, le nez et les yeux, dans un spectacle total.
Le temps fila ainsi très vite durant l’heure de la performance et si comme beaucoup, j’aurais apprécié une prolongation, je quittais toutefois la salle avec plaisir, véritablement assoiffé, affamé par les odeurs de la cuisine, et épuisé par la foule compacte limitant les mouvements, pour un moment de repos bien mérité.
Article posté originalement sur le site hexadance.com pour l’évènement: ‘16.06.2005 sonar 2005: matthew herbert – plat du jour @ CCCB (Macba)
